vendredi 27 janvier 2012

27eme NATIONAL PETANQUE de MARTIGUES 2012

LE TIRAGE DU NATIONAL:
http://www.martigues-tourisme.com/fr/rub-animation-martigues-petanque-boule.htm

vendredi 6 janvier 2012

ENTRETIEN AVEC HENRI LACROIX

Henri Lacroix, sur le toit du monde
En dix années extraordinaires, il a accumulé sept titres mondiaux, dix titres nationaux et triomphé dans tous les plus grands concours. Pourtant, et alors qu'il est considéré par beaucoup comme le meilleur joueur de la planète, le minot de la Farlède n'a pas changé : humilité, travail, joie de jouer, sens du partage, les maîtres-mots du champion du monde font de lui, plus que jamais, un modèle à suivre. Entretien avec un homme simple et talentueux.

Après sept saisons et une belle histoire au sein du DUC de Nice, tu quittes ce club cette année pour partir dans le Rhône. Pourquoi ce départ ?

Ca n'a rien à voir avec le DUC. J'ai été contacté cette année par Les Canuts, qui m'ont fait une belle proposition : le contact a été bon, et je l'ai acceptée.

Le DUC, ça été quoi pour toi ?

Sans le DUC, je n'en serais pas là aujourd'hui, c'est clair. Ce club a été le déclencheur de beaucoup de titres, il nous a fait beaucoup de bien. Il est dirigé par des gens fantastiques : Jean-Claude Muscat a fait un travail phénoménal, et le fait toujours, avec le nouveau recrutement. L'aventure n'est pas finie pour le DUC, et en ce qui me concerne, même si nos chemins se séparent, nous ne sommes pas fâchés.
Tu quittes donc Nice pour Lyon, pour y faire équipe avec Romain Hidalgo et Wilfrid Chapeland. Un mot sur ces deux joueurs ?

Romain est un joueur qu'on voit beaucoup sur le circuit des nationaux depuis quelques années. Il est très gentil, très correct, j'aime bien cette mentalité.

Elle s'est créée comment, cette équipe ?

Quand j'ai accepté l'offre des Canuts, j'ai aussi décidé de jouer avec Romain, et nous avons cherché un troisième. Romain voulait jouer avec Radnic, mais Zombie n'est pas venu aux rendez-vous qu'ils ont fixés. Romain m'a alors proposé de jouer avec Willie (Chapeland) : j'avais déjà joué avec lui et Robert Leca lorsqu'il venait à Sanary, et je l'apprécie beaucoup. J'ai dit à Romain : « Pas de problème, avec Willie, je vais au bout du monde ! » J'adore ce joueur, nous sommes toujours restés en contact, et il a l'air d'avoir envie de reprendre.


Alors, on s'interroge quand même sur cette équipe. Hidalgo est très bon, mais ce n'est pas le plus en vue de sa génération, Chapeland est un grand joueur mais a disparu du circuit depuis six ou sept ans : sans leur faire injure, ce n'est pas les partenaires auxquels on aurait pensé en premier pour ta formation 2012. Quels sont les objectifs raisonnables que peut se fixer cette équipe cette année ?

On va commencer par faire un national, La Roche-sur-Yon, pour essayer de rôder l'équipe avant les championnats. C'est vrai que j'ai d'autres obligations, avec le team France ou bien avec des amis, comme Alain Godard, et que je ne pourrai faire que celui-là en début de saison. On va donc essayer de se faire plaisir là-bas, et puis ensuite de se qualifier pour le championnat de France.
J'ai signé pour trois ans, et le club ne me met pas la pression : l'essentiel pour nous, c'est de passer de bons moments ensemble.

C'est une année chargée, puisque le championnat du monde se profile déjà à l'horizon, et ce serait une énorme surprise de ne pas t'y voir au sein de l'équipe de France. Tu en a gagné beaucoup, des championnats du monde : c'est toujours un objectif prioritaire, pour toi ?

Oui. Oui, parce que c'est Marseille. J'en ai parlé récemment avec le sélectionneur : je lui ai dit que si je n'allais pas au championnat du monde, ça ne changerait pas ma vie. J'en ai déjà fait neuf, on en a gagné sept, c'est bien. Mais je serais très heureux d'aller à Marseille : ça va être un grand challenge, il va y avoir une pression supérieure. Quand on voit ce qu'est la Marseillaise, on imagine bien ce que pourra être le championnat du monde dans cette ville. Je pense que ce sera grandiose.


Et un championnat du Monde qui peut se révéler extrêmement difficile pour la France. Nous n'avons plus qu'une équipe, et l'écart se resserre avec certaines nations, comme on l'a vu en Turquie contre Madagascar. C'est ce que tu ressens ?

Oui, bien sûr. J'en parlais il y a quelques jours avec Philippe Quintais, qui a pratiqué les championnats du monde bien avant moi : à une époque, on rencontrait beaucoup d'équipes de niveau assez moyen, ce n'est plus le cas. Tout ça n'existe plus, il faut faire très attention même contre le plus petit des pays.

On vous a vu passer d'extrême justesse en finale, contre une formidable équipe malgache. Comment as-tu vécu cette partie ?

Ca été un grand moment : je n'étais pas au top en Turquie, mais heureusement, on a eu un très grand Suchaud. Il a été phénoménal durant tout le championnat. On a eu un Bruno (Le Boursicaud) qui a été très bon, et un Thierry Grandet qui a été exceptionnel et qui aurait mérité de faire les phases finales. Et puis il y a eu cette finale où il a fallu s'arracher, et où nous sommes passés par un trou de souris. Mais nous sommes passés...


Une finale au cours de laquelle on a senti les deux équipes très proches l'une de l'autre...

Oui, on a gagné et on en est très contents, mais si on avait perdu, je pense qu'il n'y avait rien à dire. Les Malgaches méritaient la victoire autant que nous.

Aujourd'hui, beaucoup te considèrent comme le meilleur joueur du monde. En 2001, tu n'étais encore qu'un jeune joueur varois plein de talent. Cette année-là, tu as gagné le championnat de France, la Marseillaise et le championnat du monde. C'est là que tout a commencé, bien sûr ?

En fait, ça a commencé au championnat du Var. Avec Robert Leca et Claude Marin, on a gagné un seizième 13-12 contre une équipe qui a eu deux fois la gagne, en quart nous étions menés 0-7 contre Coulomb-Oddoux-Poncet avant de nous qualifier. Au France, ça été pareil, avec une partie après les poules où nous étions à l'agonie, gagnée 13-12. A la sortie, nous sommes champions de France, et je pense que là, les portes se sont un peu ouvertes.

Revenons sur cette fantastique décennie, qui t'a vu conquérir tous les plus grands titres et gagner tous les plus grands concours. Quand tu repenses à ces années, quel est le souvenir qui surgit en premier ?

Le premier titre de champion de France. Je l'ai eu avec Claude Marin et Robert Leca : ce sont mes amis, c'est avec eux que j'ai commencé à jouer. C'est vrai que ce titre nous a marqués : nous faisions une équipe correcte, capable d'avancer, mais de là à imaginer être champions de France, c'était une autre histoire. Nous avions échoué en quart l'année d'avant, contre Radnic-Milei-Xisto, après une très belle partie, et je pense que c'est avec ces deux résultats que j'ai obtenu ma sélection en équipe de France .


Une sélection qui constituait un gros test. Tu rentrais dans une équipe qui comptait déjà deux multiples champions du monde, ce n'était pas facile...

Oui, mais en même temps, je vivais le rêve de tous les joueurs de boules qui ont fait quelques beaux résultats. Quand c'est le cas, on rêve de jouer avec les meilleurs. Pour moi, le meilleur ça a toujours été Quintais, et même aujourd'hui, c'est toujours le meilleur pour moi. Et Philippe Suchaud, c'est le meilleur tireur de tous les temps. Donc c'était un rêve de rentrer dans cette équipe : ce n'est pas facile, mais si on tient sa place, ce n'est que du bonheur.

Il y a eu un moment de vérité, dans ce premier championnat du monde ? En quart contre l'Espagne, tu as eu deux boules très très chaudes à tirer. Tu t'en souviens ?

Oh, oui ! Il y avait une pression énorme. Comme on dit chez nous : « La paille ne rentrait pas ! »


Donc, la pression existe, même pour les grands joueurs ?

Bien sûr. Celui qui dit qu'il n'a pas la pression, c'est un menteur. Naturellement, dans un petit concours, ce n'est pas le cas, on s'amuse. Mais dès qu'il s'agit d'un beau concours, qu'il y a des boules capitales, qu'il y a des belles équipes en face, on est obligé de rencontrer la pression. Naturellement, elle peut faire bien jouer ou mal jouer : depuis quelques années, on a la pression, mais ça se passe toujours bien.

Cette équipe, on l'a bientôt appelée la Dream Team, et elle s'est imposée partout. Tu as conscience, là, d'avoir formé ce qui a peut-être été la meilleure équipe de tous les temps ?

Oui, parce qu'on l'a beaucoup dit et parce que les résultats ont été là. D'ailleurs, il ne faut pas en parler au passé parce que ce n'est pas fini, on fera toujours quelques concours ensemble. Alors, oui, c'est peut-être la plus belle équipe du monde, mais ce n'est pas moi qui l'ai formée : c'est Jean-Claude Muscat.


Un mot, alors, sur tes deux partenaires de la Dream team. Philippe Quintais ?

Philippe, c'était mon idole quand j'avais dix ans, l'âge de mon fils : ça restera toujours mon idole. Mais maintenant, c'est encore plus : on a partagé beaucoup de choses, l'amitié est là, il est devenu comme un frère. J'ai deux frères dans le monde des boules : Philippe Quintais et Simon Cortès.

Et Philippe Suchaud ?

C'est un peu différent. Suchaud, c'est un garçon très gentil, mais un peu spécial. Pendant des années, il nous a dit : « Vous n'êtes que des relations de pétanque, vous n'êtes pas mes amis. ». Alors, on le prenait comme il était, mais après tout ce qu'on avait vécu avec lui, ça faisait un peu drôle. Bon, ça date de trois ou quatre ans : il a peut-être changé d'avis depuis...
Après, dans le jeu, quand il est en forme, c'est le meilleur tireur du monde. Quand il n'est pas en forme, par contre, il est très difficile à jouer.


Tu travailles au Service des sports de la Ville de Hyères, et tu diriges, avec ton associé Thierry Terreno, la société Planète Pétanque. On a le sentiment, même si la pétanque t'apporte quelques revenus, que tu fais en sorte de ne pas compter sur l'argent que génère ton activité de joueur. Je me trompe ?

Non, en effet. Mon travail passe avant : j'ai une bonne place à la Mairie de Hyères, avec des chefs et des collègues avec qui je m'entends bien, notamment Cédric Gérard avec qui je m'occupe de l'école de boules. Planète pétanque est aussi très importante : nous fournissons des équipements pour les clubs et distribuons également les foies gras et les produits d'Alain Godard auprès de comités d'entreprises. Bien sûr, la pétanque apporte un plus non négligeable à tout ça, avec des sponsors de plus en plus nombreux, mais on ne peut pas compter là-dessus pour vivre.

Avec Thierry Terreno, tu partages aussi quelques beaux moments de boules. 2011 vous a vu gagner un nouveau titre au jeu provençal. C'est le quatrième?
Oui, et on ne pourra pas le défendre, une fois de plus. Ca s'était déjà produit en 2005, quand je suis parti au DUC. C'est comme ça...



Depuis quelques années, on voit toute une jeune génération, constituée de joueurs talentueux et ambitieux, prendre peu à peu le pouvoir sur le circuit des nationaux. Toi qui es à l'apogée de ta carrière, quel est le conseil que tu pourrais leur donner ?

Rester humble. Beaucoup de ces joueurs ont vu leur tête doubler de volume, se font remarquer partout. Inutile de donner des noms, je pense qu'ils se reconnaîtront. C'est dommage pour eux, ils ont beaucoup de qualités et de moyens, et n'ont pas besoin de faire tout ce qu'ils font. C'aurait pu être des jeunes intéressants, avec qui j'aurais pu jouer, partager des choses : ce n'est pas le cas. Tels qu'ils sont, je ne peux pas jouer avec eux, et je ne jouerai jamais.

Il y en a un qui trouve grâce à tes yeux, puisqu'on te voit souvent jouer avec lui, c'est Dylan Rocher. Qu'est-ce qu'il a de plus ?

C'est très différent. Dylan a la tête sur les épaules, il est réaliste. Il est très jeune, mais il a tout compris avant les autres : donc avec lui, ça se passe très bien. Depuis trois ans, on fait quelques concours ensemble : cette année, nous allons à Cholet, puis à Cannes. Je l'apprécie beaucoup, et je pense qu'il m'apprécie aussi. Je l'ai connu tout petit, il a toujours eu de très bonnes relations avec mes enfants, ma famille, j'aime beaucoup jouer avec lui.


Dans la vie, tu es quelqu'un de calme, d'affable. Mais ce qui marque lorsqu'on te voit en compétition, c'est ta grinta, ton énorme volonté de vaincre. Comment fais-tu pour avoir encore ça en toi, aprés autant de grandes victoires ?

Je dois avoir ça dans le sang. Dès que j'avance dans une compétition importante, ça vient tout seul : l'adrénaline monte, il y a cette rage qui arrive. Je ne saurais pas l'expliquer, mais ça peut être la source de nouvelles victoires...

Tu étais déjà extraordinairement doué lorsque tu étais très jeune, et on pourrait penser que la carrière que tu mènes t'était promise, qu'elle est le résultat logique de ce talent. Est-ce que tu es d'accord avec ça, ou bien penses-tu qu'il a fallu que la chance s'en mêle ?

Bien sûr qu'il a fallu de la chance. Des gens qui jouent très bien, on en connait tous beaucoup, et ils n'ont pas eu cette carrière. Il faut de la chance à un moment, elle produit un déclic qui entraîne tout le reste. Moi, j'ai eu la chance d'être dans le bon wagon, sur les bons rails, et de ne pas dérailler.


Entretien réalisé par Pierre Fieux "BOULEGAN"